Admirateurs de longue date de Mathieu Boogaerts, c’est tout naturellement que Salomée et Séraphin se sont associés pour élaborer cette chronique du dernier album de l’artiste.
Une plongée dans un univers qui leur est cher.
Temps de lecture : 2 minutes
Mathieu Boogaerts, le réputé drôle d’oiseau de la chanson française, fait son retour « En anglais » sur la scène musicale.
© Hrvoje from Paris, France, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons
Expatrié à Londres depuis 2016, année de parution de son dernier album Promeneur, le compositeur-chanteur-interprète Mathieu Boogaerts est revenu le 26 février dernier avec un opus dans la langue de Shakespeare. En anglais — c’est son titre — se compose de onze morceaux fidèles à la patte singulière de l’artiste. Son minimalisme assumé, son goût pour le métissage musical, son humour et sa poésie lunaire sont au rendez-vous. Avec un champ lexical restreint et un french accent assumé, Mathieu Boogaerts cherche à être compris, sans difficultés et sans posture, par ses nouveaux voisins comme par ses auditeurs de la première heure.
« J’écris des chansons parce que j’ai un besoin viscéral de formuler des sentiments. Et dans un environnement complètement exotique où personne me connaît et personne me comprend, ni ma langue ni le français que je suis, je me suis vite senti frustré : quel sens ont mes chansons ici, quel sens moi j’ai, quelle légitimité ? Et j’ai dit allez, j’écris en anglais, comme ça ça va créer un pont, si je chante ma chanson au voisin il va comprendre. »
Interview par Cécile Magnier, le 08/02/2021
Dans ce huitième disque, Mathieu Boogaerts s’approprie la langue de son pays d’adoption et joue habilement avec les références musicales du répertoire britannique. Le morceau liminaire, Annie, en est l’exemple-type : Mathieu Boogaerts revient ici au genre de la balade amoureuse et mélancolique qui lui est familier, mais évoque pour la première fois un amour adultère, et donc impossible (« I know she has a husband / I saw her in his hands / I know she’s not my girlfriend / No no there’s no happy end ») tout en s’appropriant un refrain bien connu des Clash (« I dont know what else to say / Shall I go or shall I stay ? »).
L’usage de la langue de Shakespeare n’est pas nouveau chez l’artiste. Dès son premier morceau, Ondulé, sorti en 1995, l’anglais façon Boogaerts était déjà bien présent ! Un anglais maladroit, mais d’une maladresse charmante, cultivée comme une poétique du langage. Un anglais hybridé avec le français, parfois présent sous la forme d’un seul mot glissé dans le texte, sorte de curiosité exotique. Un anglais aux syllabes détachées, scandées d’une voix douce, à l’accent ô combien frenchy. Avec ce nouvel opus, il s’en donne à cœur joie.
En anglais, ce sont onze chansons construites comme une série de miniatures, de cartes postales du quotidien et de l’intime à travers lesquelles Mathieu Boogaerts porte un regard tantôt tendre et émerveillé (Am I crazy) et tantôt ironique (You Like me) sur sa terre d’adoption. Onze chansons-émotions parmi lesquelles on retiendra, entre autres, Guy of Steel : complainte émouvante d’un « Superman sans émotions » (« I am a man of steel / So I never feel ») qui, très habilement, pointe du doigt le sentiment de « toute-faiblesse[efn_note]Interview de Mathieu Boogaerts, le 22 mars 2021, par Thomas Soulet[/efn_note] » qui se cache souvent derrière celui de toute-puissance.
Vous l’aurez compris, Boogaerts En anglais, c’est very good, very, very good.
Salomée & Séraphin
Pour en découvrir davantage :
https://mathieuboogaerts.com/
https://www.youtube.com/channel/UC6j93CIl_YPi6CdwznmN1Kw